PILIER SUD DE LA BARRE DES ECRINS (IV/TD-/5c) (1300m)
Materiel : Tout pour le rocher + crampons et piolet. Un brin de corde de 60 mètres est suffisant sachant que le poid est déterminant.
Niveau : Le niveau technique n'est pas très élevé cependant il faut avoir une bonne caisse et un bon moral
C'est au début de l'été que JC avait lorgné sur cet immense pilier au cours d'une randonnée avec ses parents. Rentré de cette balade il me parle donc de cette immense face sud de la barre des Ecrins. Il me semblait bien avoir déjà entendu parler de ce pilier au détour de recherche sur C2C et trouvais l'offre plutôt cool. Après quelques investigations sur le net je donne mon feu vert à JC. Ce sera pour les 9 et 10 aout...2 jours car nous optons, après moult réflexions, pour le bivouaque à mi hauteur de la face.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, une petite description de la face s'impose. Le pilier fait grossomerdo 1300 m de haut. Les 600 premiers mètres déroulent plutôt bien avec cependant un passage pénible sur des pentes peu raide en pierrier et plutôt exposées aux chutes de pierres. La suite jusqu'au pied de la tour rouge est plus agréable avec 2-3 passages en cheminée bien verticaux et parfois étroite avec le sac. La tête rouge est en bon rocher globalement. Vient ensuite le bastion, le passage clé du pilier : Un ressaut raide de 300 m avec un passage en V+ sur du caillou plutôt pourri dans les longueurs du milieu. Seule cette portion mérite de tirer des longueurs. Reste 300 mètres après le Bastion dans du rocher péteux avant de déboucher sur l'arête sommitale et de toucher la croix.
Je récupère donc JC à Sainté vendredi soir direction le pré de Mme Carle, 3h30 de route en perspective. La nuit approchant on s'arrête à la Grave histoire de préparer les sacs et de bouffer un morceau. JC se rend alors compte qu'il a oublié son futal (il était prêt à en chialer), finalement le mec du bar à coté du gîte lui prêtera un pantalon de snow (pantalon que JC finira par perforer malgré d'infinis précautions)...La stratégie choisi pour faire ce pilier sera donc de bivouaquer le moins loin possible du Bastion. On décolle du Pré au petit matin le samedi et arrivons à la rimaye (2800m) vers 10H déjà bien transpirant.
A cet instant on se dit qu'on risque de grave en chier vu le poids de nos sac... on va en effet pas mal en chier. M'enfin, on n'est pas venue là pour faire du tourisme alors bon...on passe la rimaye. Juste après l'avoir franchie, un énorme éboulement au niveau du pic Coolidge nous met direct dans l'ambiance, les chutes de pierres ne cesseront pas pendant la journée, cependant on est jamais vraiment exposé dans le pilier. On arrive rapidement sur la rampe oblique où là nous montons un peu trop haut, on traverse alors complètement pour rejoindre le fil du pilier. Ca parpine pas mal dans cette zone méfiance donc...Vers 17h30, je tombe sur un superbe emplacement de bivouaque aux alentours de 3400m. Je propose donc à JC de stopper là pour aujourd'hui étant sceptique sur les éventuels bivouaques qu'on trouverait plus haut.
JC est OK, on s'arrête donc ici pour aujourd'hui. Le couché de soleil depuis cet emplacement est magique, les faces Nord s'embrasent soudainement et nous offrent un spectacle fabuleux durant un bref instant.
Et nous au spectacle...
C'est beau...Mais bon nous on se pose quand même pas mal de questions pour le lendemain à propos du poids de nos sacs. Pour parer ce problème on prend donc le minimum d'eau et de nourriture et offrons le surplus de bouffe à un choucas qui dîne avec nous.
6h30, on décolle du bivouaque et on se fourvoie d'emblée, 1h de perdu. Putain ça part bien c't'affaire. On arrive finalement au pied du bastion vers 10h30.
JC enchaine la première longueur en traversée en V- non sans quelques noms d'oiseaux envers cette !?#@%€ de corde qui ne veut pas venir. Ça passe quand même, bien qu'il n'ait pas vraiment traversé assez avant de faire le relais, m'enfin ça ira. Les longueurs intermédiaires du bastion déroulent bien et on arrive au ressaut final.
Bibi en pleine action dans le bastion
Il se trouve que c'est pour ma pomme : une fissure en V puis une traversé en V+ avant de faire relais le cul dans le vide (soit en gros 1000 m plein gaz jusqu'au glacier noir). C'est passé, ouf...les difficultés sont derrières nous...tu parles!!
(C'est au milieu du Bastion qu'une cordée de Grenoblois nous dépasse(Salut à vous et chapeau pour votre horaire!). Leur stratégie est radicalement différente :http://www.camptocamp.org/outings/135939/fr)
On sort du bastion à 16h plutôt content, je fais 2-3 photos (les dernières avant que mon !?#@%€ d'appareil ne me lache) une petite barre et on renchaine.
Les ailefroides depuis le sommet du bastion
J'avais bien intégré suite à mes recherches sur le net que les 300 derniers mètres étaient très pénibles. Et ils sont en effet horriblement longs sur un caillou plus que pourris. Vers 17h JC a eu un petit coup au moral en regardant son altimètre qui lui indique que le sommet est encore à 200 mètres...Il me soumet alors ses doutes et envisage de bivouaquer une seconde nuit, hors de question pour ma part. Hop hop hop on avance. Finalement l'altimètre plantait de 100 mètre et à 18h je vois la croix se profiler devant moi. J'attends mon pote pour toucher la croix... Summit (4102 mètre)
Quel bonheur au sommet seul au monde après tous ces efforts. Vue infinie à 360°...génial. On aperçoit les Grenoblois qui attaquent la descente. Je suis un peu vert de ne pas pouvoir nous prendre en photos après tous ces effort mais bon ce n'est pas bien grave. On part du sommet avec le brouillard qui s'installe en face Nord, la traversée de la barre est expédiée en 1h. On galère un peu pour rejoindre la neige à cause du brouillard mais à 20h on est sur le glacier blanc.
La traversée de la barre des écrins après le sommet
La descente de ce glacier pour rejoindre le refuge des Ecrins à 3172 mètre, sera un véritable calvaire. On s'arrêtera 2 minutes au milieu du glacier sous la nuit saturée d'étoiles et entourée de toutes ces parois... J'en chie grave mais je ne donnerais ma place pour rien.
On finira par rejoindre le refuge des écrins après s'être retapé 100 petits mètres de dénivelé... Finalement la course fut intense, parfois pénible mais avec une ambiance grandiose et omniprésente notamment au relai à la fin de la longueur en V sup.
Course à conseiller donc, mais évidement pas pour la qualité de l'escalade. Après coup, il est clair que nous étions (beaucoup) trop lourds. Je pense qu'il faut trouver un compromis entre un sac ultra léger où le moindre pépin n'est pas envisageable et la stratégie lourde que nous avons employé et qui nous a considérablement ralentit.
Album photo : ICI